Le puma est présent du Nord au Sud du continent Américain, mais c’est dans l’extrême Sud du Chili que l’on y trouve les plus gros spécimens.
Le Seigneur de la Patagonie
À la fois admiré et craint, parfois détesté, le puma n’est autre que le Seigneur des lieux. Cela fait longtemps que j’espérais croiser son chemin. J’ai tellement entendu parler de lui, à travers des témoignages, des récits, des contes et des légendes.
C’est dans les environs du Parc National Torres del Paine que le puma aime résider. Je suis déjà venu plusieurs fois par ici, lors de mes précédents voyage de reconnaissance dans le sud du Chili, en espérant pouvoir l’apercevoir, même furtivement. Mais je n’ai jamais eu cette chance…
Cette fois-ci, c’est différent, il est LA raison de ma venue, de l’aventure qui m’attend : un safari photo dédié au puma. J’ai voyagé jusqu’ici pour lui, pour le pister et pouvoir observer sa splendeur. Après une longue route, les premières lueurs d’un monde sauvage et magique se dessinent.
Le climat est à l’image de la beauté des paysages qui me font face : insaisissable… Ici, dans le Grand Sud de la Patagonie, les trois règnes – animal, minéral et végétal – ont comme passé un pacte pour mieux se sublimer.
La boule au ventre, je m’introduis alors avec humilité sur son territoire, dans son royaume, où j’espère bien pouvoir rencontrer le Grand PUMA !!
Sur les traces du Puma
Pour cette aventure je suis accompagné de Roberto, qui est connu pour être le meilleur guide et connaisseur du puma dans la région. Durant quatre jours, nous sillonnons tous les deux les milliers d’hectares de steppe Patagonienne à perte de vue.
Les paysages sont exceptionnels. Aucune présence humaine, à 360 degrés ce sont massifs, lagunes, lacs qui nous entourent. Nous observons également de nombreuses formations rocheuses qui sont des potentielles cachettes pour les pumas qui aiment s’y confondre pour se reposer.
La faune est abondante ici, au Sud de la Patagonie chilienne : des guanacos par centaines, des nandous « ñandú » (petites autruches), renards, condors, beaucoup d’oiseaux et j’en passe… Mais le seigneur des lieux, le Puma de Patagonie, maîtrise à la perfection l’art du déplacement et du camouflage. Quel animal fantastique…
Nous le pistons depuis trois jours déjà. Tous les jours le départ se fait à 06h30 du matin pour arriver sur le site au lever du jour. Démarre alors une recherche intense aux jumelles, mais surtout avec une longue vue thermique qui capte le rayonnement infrarouge (ondes de chaleur) émis par le corps, qui varie en fonction de sa température.
Mais notre plus grand allié pour cette recherche est le guanaco. Le guanaco est en effet la proie préférée du puma, et lorsque le guanaco se sent menacé par un puma, il est nerveux et émet un son d’alerte assez caractéristique qui nous signale donc une éventuelle présence d’un puma dans la zone.
Nous avons pour le moment observé plusieurs pumas à distance, lorsque nous arrivons sur place ils ne sont plus là, ils disparaissent dans la nature. Pour le moment, nous n’avons rien observé de très près, je suis un peu frustré d’ailleurs. Les conditions climatiques sont pourtant optimales : ciel dégagé même au grand bleu, et pas de vent, c’est même inespéré pour la région.
Demain, c’est le dernier jour et ce sera, semble-t-il, le jour de la rencontre tant attendue pour moi. En effet, nous venons de trouver un guanaco mort qui fera l’affaire pour plusieurs repas, pour un ou plusieurs pumas. Nous serons là au lever du jour, camouflés, et nous attendrons l’apparition du Seigneur de la steppe Patagonienne…
La rencontre tant attendue avec le Puma
Comme à notre habitude, nous étions sur le site dès 08h00, à une trentaine de mètres de la dépouille du guanaco que nous avions repérée la veille. Nous étions en avance sur le soleil… allons-nous réussir cette fois ci à devancer le puma ?
Nous retenons notre souffle, tout en observant un peu dans toutes les directions si un puma n’allait pas apparaître. Seul le bruit du silence de la steppe se laissait écouter. Une heure plus tard et toujours rien…
Soudain, apparu de nulle part, il était là ! Nous apercevons la tête d’un puma sur un promontoire naturel, face à nous. Un frisson parcourut alors tout mon corps, il était là devant moi, le seigneur de la steppe Patagonienne, couché sur ses pattes avant, en position d’attente, en alerte… Roberto identifia assez rapidement qu’il s’agissait d’une femelle de quatre ans environ.
Certainement qu’elle devait tout observer de là-haut, certainement qu’elle devait voir et entendre des choses imperceptibles pour nous. Qu’attend-elle au juste ? Enfin, au bout d’un long moment, elle se leva et commença à marcher avec une élégance incomparable. Je vis alors toute sa beauté, sa silhouette, sa prestance, son élégance…
Le regard fixe, impassible, elle s’avança sur le cadavre du guanaco et commença son repas. Tous ses sens sont alors en alerte, elle ne cesse de regarder un peu partout, sûrement la présence d’un autre puma dans la zone l’angoisse-t-elle un peu.
Une fois le festin terminé, elle s’écarta et se mit à marcher vers nous, droit sur nous… je sentis alors mon cœur s’accélérer !! J’avais du mal à prendre ces clichés qui allaient rester pour moi, historiques !!
Le puma passa à cinq mètres de nous, j’ai alors croisé son regard, le regard d’un puma !! Quel frisson !!!! Elle si sereine, moi un peu inquiet je dois l’avouer. Elle nous avait vu depuis le début, c’est évident, mais à priori nous ne représentions aucune menace pour elle. Ou alors la faim a-t-elle pris le dessus sur son instinct de prudence ??
Puis, tel un cadeau du ciel, elle se positionne sur un autre promontoire, avec les tours du Paine comme décor de fond. J’avais rêvé ce cliché dans mes rêves les plus fous et voici l’univers qui m’offre ces instants magiques !!
Je mitraille de photos, je ne sais plus si faire des plans serrés, larges ; comment paramétrer l’ISO. Je shoot complètement à l’instinct. Puis, soudain, elle se courba et regarda au loin et commença à détaler vers le contrebas pour s’éloigner, et disparaître aussi vite qu’elle était apparue. Elle a sûrement repéré une menace pour elle. Nous, de notre côté, nous sommes seuls au monde…
Nous nous regardons avec Roberto, sans voix, j’ai compris dans son expression que nous venions de vivre un moment unique et magique. Cette matinée restera gravée pour toujours dans ma mémoire. J’étais alors loin de me douter qu’une autre rencontre de taille allait se produire en fin de journée…
Le Graal : une maman et ses petits
Après un pique-nique dans un site somptueux, à couper le souffle, à peine remis de nos émotions, nous reprenons nos recherches pour une éventuelle nouvelle observation.
Roberto m’expliqua que la femelle puma était partie un peu précipitamment, probablement à cause de la présence d’un mâle alpha surnommé « Dark », qui voulait sûrement participer au festin, très difficile à approcher.
En fin d’après-midi, nous recevons une alerte d’un autre guide qui aurait repéré une femelle puma adulte avec ses deux petits. Ils se trouvaient dans un autre secteur, complètement à l’opposé de notre position.
Nous étions surexcités à l’idée de pouvoir observer une nouvelle scène de la vie sauvage de Patagonie. Allions nous arriver à temps ? Tellement de fois le puma avait déserté les lieux une fois que nous étions arrivés sur place.
À notre arrivée, le guide et son client étaient là et je vis des étincelles dans leurs yeux. Nous étions quatre à pouvoir observer cette scène unique. Une femelle puma adulte avec ces deux chatons de quatre mois environ !
Nous avons pu les observer durant presque deux heures, regardant les petits jouer entre eux, sous l’œil de leur mère attentive, à l’affût d’un éventuel danger.
Roberto eut alors la bonne intuition de se déplacer vers un autre point, plus en contrebas, en direction d’un point d’eau. Il insista sur le fait de rester groupé lors de ce déplacement un peu « osé » voire « risqué » (?) peut-être… La notion de « groupe » étant toute relative, sachant que nous n’étions que quatre personnes au milieu de ces étendues sauvages, me suis-je dit sur le moment.
Ensuite, comme par magie, les trois félins prirent la direction de la rivière pour aller se rafraîchir. Nous étions sur leur chemin et bien entendu, là encore, nous étions repérés (et acceptés) dès le début de notre arrivée.
La mère passa juste devant nous, impassible ; quelle prestance ! Là, je compris alors pourquoi le surnom du puma est « le lion des montagnes ». Cette femelle très imposante, d’environ 1,70m de long, avait bien l’apparence d’une lionne, majestueuse… Sauf que nous ne sommes pas en Afrique, pas à bord d’une Jeep, mais bien à pied, juste à côté de ces félins ! Quelles sensations et quelles émotions !
Je regardais au loin les trois pumas se confondre avec le paysage, et disparaître à nouveau. J’avais l’impression d’avoir rêvé cette scène, mais non, ce fut bien réel ! Je suis conscient d’avoir vécu une journée unique, dans des conditions exceptionnelles. Un cadeau du monde animal sauvage et de Dame nature.
Lorsque le guide qui vous accompagne prend autant de photos que vous, voire plus encore, c’est que la rencontre qui s’offre à vous est hors du commun. D’ailleurs, Roberto m’a confié sur le moment, qu’en la présence de touristes il ne devrait pas prendre de photos. Je lui ai alors répondu assez instinctivement : « Mais Roberto, je ne suis pas un touriste, mais un voisin ! »
Oseriez-vous vous aventurer sur le territoire du Puma ?