L’Antarctique est le continent le plus venteux, le plus froid, le plus sec, le plus désertique et le plus haut de tous. C’est le bout du bout, la terre la plus australe au monde. Un continent à part entière (environ une fois et demie la taille de l’Europe), une terre qui n’appartient à personne, aucune nation n’a de souveraineté sur ces millions de kilomètres carrés, et ce jusqu’en 2048… C’est le paradis de la nature libre et sauvage.
L’aventure commence forcément au Sud de la Patagonie Argentine, à Ushuaïa : ville mythique du bout du monde. L’arrivée en avion est fantastique. Le survol du canal de Beagle avec la Cordillère des Andes et la mer en toile de fond. Le bateau est amarré au port, il nous attend.
Le nombre de fois où je suis allé à Ushuaïa en voyant ces bateaux, en me disant « un jour, ce sera mon tour d’y aller »… Cette fois ci ça y est, c’est pour moi !
Mais je voulais réunir les meilleures conditions pour vivre cette aventure. La première occasion me fut donnée en mars 2020, mais le voyage fut annulé à cause de la pandémie. Je partais de chez moi valises faites, lorsque mon téléphone sonna pour m’avertir de ne pas monter dans l’avion, que l’expédition était annulée…
Décidément il faudra que j’attente encore… Mais comme rien n’arrive vraiment par hasard, je crois que j’ai bien fait d’attendre, pour finalement profiter de cette croisière Antarctique dans les meilleurs conditions.
Je dois remercier la société Exploris et particulièrement Corinne Renard pour m’avoir tout simplement invité. C’était la première sortie croisière sur la Péninsule Antarctique pour ce nouveau groupe francophone et son nouveau bateau « Exploris One », un navire de toute dernière génération.
Nous étions un groupe super sympa, profitant de conditions uniques : avec un équipage formé de 118 personnes rien que pour nous. Un vrai privilège !
Mais le sixième continent se mérite… En effet l’Antarctique est séparé de la pointe sud de l’Amérique du Sud par l’une des traversée maritime les plus redoutées et emblématiques au monde : le passage de Drake.
Ce détroit relie l’océan Atlantique à l’océan Pacifique. Caractérisé par des conditions météorologiques souvent tumultueuses, le passage de Drake est réputé pour ses mers agitées et ses vents puissants. Les navigateurs et explorateurs en route vers l’Antarctique doivent souvent faire face à des vagues imposantes et à des vents violents, faisant de ce passage une étape redoutée, mais incontournable, pour quiconque souhaite explorer les régions polaires. Malgré ses défis, le passage de Drake offre également des paysages marins époustouflants, avec des icebergs dérivant depuis l’Antarctique.
Pour ma part, la traversée aura été plutôt tranquille. Avec des « petits » creux de 4 mètre de haut, rien de bien méchant en fait… La traversée dure environ 48h… à la fin de la première journée nous entrons enfin dans les eaux de l’Antarctique où, au moment du dîner, nous avons eu le privilège de croiser le premier Iceberg.
J’avoue ne pas m’être levé de ma chaise, pensant que cela allait ressembler aux nombreux icebergs dérivants que l’on peut voir sur le lac Argentino dans le parc des glaciers en Argentine, ou sur le lac Grey dans le Parc Torres del Paine au Chili. Mais celui-ci était bien d’une toute autre taille ! 64 mètres de haut sur 370 mètres de long pour être tout à fait précis ! Et là, je dois avouer que mon étonnement fut de taille.
L’approche de la péninsule antarctique déclenche une émotion particulière pour tout homme qui a la chance de venir sous ces latitudes. Sur les traces de grands explorateurs du début du 20ème siècle, nous entrons au petit matin au milieu d’un paysage à couper le souffle. Iceberg, montagnes, glaciers vertigineux, nous voilà dans le paradis blanc. Aucune trace humaine, les animaux sont Roi ici.
Ça y est, nous y sommes enfin… le silence et l’état de béatitude du groupe est à la hauteur des paysages qui nous entourent. Avec une émotion vive, nous nous sillons un chemin à bord d’un zodiac pour mettre pied à terre et contempler ce spectacle, sur ce territoire de science et de paix…
Les sites à visiter sont nombreux, ils sont choisis par ordre d’inscription sachant qu’il n’est pas possible d’être deux bateaux en même temps sur un même site. Pour notre groupe, la première « mise en bouche » fut l’Île Barrientos. Nos premiers manchots sont bien là et quel nombre !! Le spectacle est assez fantastique, et j’avoue que de mettre pied à terre après 48h de navigation est fort agréable.
La visite des sites s’enchaineront jour après jour et de manière exponentiel. Les manchots sont omniprésents, sur terre bien entendu et dans l’eau. Selon les spécialistes, les manchots papou, à jugulaire et Adélie sont présents ici. Quant aux manchots Royal et Empereur, plus imposants, eux sont plus au sud, à l’intérieur du continent.
Les baleines sont très nombreuses, nous en avons vu tous les jours. De nombreuses orques également qui se déplacent souvent en groupe. Également des phoques, les cinq espèces présentes ici sont le phoque de Weddell, le phoque Crabier, le phoque de Ross, l’éléphant de mer du sud et le léopard de mer. Dans les airs, Les cormorans, albatros, labbes et pétrels sont aussi omniprésents. Nous ferons tous les jours de nombreuses sorties en zodiac et même en kayak pour être encore plus près des éléments et avoir une perception ua ras de l’eau.
Les journées passent et nous sommes tous subjugués par la beauté et la pureté de ces paysages. Une émotion très forte nous gagne, le sentiment d’avoir vu le bout d’un continent complètement vierge, où l’Homme n’a aucune emprise. Personne ne vit ici hormis quelques scientifiques. Aucune construction non plus. Rien n’est aménagé. Tout est naturel, pure, vierge, comme au matin du premier jour…
Pouvoir observer les baleines, orques, léopards de mer et phoques de Weddell à quelques mètres, ainsi que des milliers de manchots ; c’est tout un sanctuaire animal qui se trouve ici.
Après l’Antarctique, il reste la lune… On ne peut repartir d’ici sans être changé, intérieurement, émotionnellement. D’ailleurs, nombreux d’entre nous ont pleuré, pour diverses raisons sans doute, mais avec un fil conducteur commun : prendre conscience que ces paysages sont bien sur notre planète, dans ces derniers retranchements, tel un jardin d’Éden à l’extrême sud du Grand Sud.
Espérons que l’appétit des Hommes pour les ressources de ce continent pourra être à nouveau contrôlé et règlementé, et que tous les gouvernements continueront de reconnaître ce vaste territoire aux seuls souverains légitimes : à tous ces animaux de l’Antarctique.
Puis, nous tournons le dos à l’Antarctique, au milieu de sculptures de glace. En face, la mer de Drake nous attend pour un long voyage, celui du retour à Ushuaïa…